La réputation de la sulfureuse Marlene Monteiro Freitas n’est plus à faire sur les scènes européennes. Chorégraphe de l’étrangeté et de l’animalité indomptée, l’artiste capverdienne, habituée des plateaux du TANDEM, embarque cette fois neuf danseurs dans une intense pièce sur les figures du Mal.

Mouvements saccadés, visages déformés, corps possédés, rythme effréné… Les pièces de Marlene Monteiro Freitas sont aussi fascinantes que dérangeantes. On y voit souvent des danseurs hors d’eux-mêmes, en proie à un trouble sauvage et comme traversés par des forces obscures et puissantes. Sa nouvelle création, Mal - Embriaguez divina (Mal - Ivresse divine), ne devrait pas échapper à cette attirance qu’éprouve la chorégraphe pour l’incontrôlable et l’excès. Elle a d’ailleurs souvent évoqué sa fascination pour les rituels transgressifs des carnavals de rue qui ont marqué son enfance. Dans cette pièce chorale centrée sur les différentes figures du mal, un groupe d’individus, installé dans une tribune, est en proie à d’obsédantes visions, des témoignages toxiques, des impressions bactériennes, des faits pourris. Le Mal ici s’exprime à la croisée du discours religieux, moral, éthique, politique et judiciaire. Citant l’écrivain Georges Bataille, pour qui l’activité humaine est motivée par le désir de s’éloigner du morbide et de conjurer le Mal, Marlene Monteiro Freitas cherche au contraire, comme de nombreux artistes, à approcher cette réalité.