On savait dès le départ que Feu ! Chatterton – patronyme en référence à un poète du XVIII^e siècle au spleen suicidaire – était bel et bien parti pour durer. Dans le cahier des charges initial, de la luxuriance, des élans romantiques et épiques, de l’ambiguïté stylistique et temporelle, des ruptures rythmiques haletantes, des textes denses et lettrés. Et la voix de prédicateur d’Arthur Teboul, charismatique chanteur à la théâtralité expressive. Toujours en liberté non surveillée, le groupe place le curseur encore plus haut avec un troisième album, Palais d’argile, accueilli par un raz-de-marée de critiques dithyrambiques. Il confie ici les clés de son intérieur à Arnaud Rebotini, figure totémique de la scène électro, césarisé pour la musique du film 120 battements par minute. Disque politique et poétique, riche en synthés analogiques, qui embrasse soubresauts groovy, percées postpunk et propos sur la déshumanisation d’une société accro aux écrans. « Un monde nouveau, on en rêvait tous / Mais que savions-nous faire de nos mains ? ». Espoir et angoisse entremêlés, à l’image de ce percutant constat-refrain.